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Michel Agostini, directeur du CNIV, les vins AOC
Article mis en ligne le 1er novembre 2004
dernière modification le 25 mai 2023
Michel Agostini, les vins AOC : la carte du goût
 
Dans l‘immensité du choix de vins proposés par le marché, le consommateur trouve un certain nombre de bouteilles provenant de régions déterminées, et labellées AOC (Appellation d’Origine Contrôlée). Michel Agostini, directeur du CNIV(Comité National des Interprofessions des Vins à Appellation d’Origine), nous rappelle les enjeux de cette mention.
 
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Franc-Parler : Pourriez-vous situer votre travail ?
Michel Agostini : Je m’occupe de l’organisation qui regroupe à Paris l’ensemble des interprofessions des vins d’appellation d’origine française en passant de la Champagne, à la Provence, au Languedoc, à Bordeaux, en Alsace, en Beaujolais, et au Val de Loire, toutes ces belles régions, et ces organismes ont en charge, chacun de façon indépendante, la régularisation du marché et la promotion des produits des bassins de production. Ce sont eux, par exemple, qui conduisent des opérations de communication au Japon comme il y en a pour les vins de Bordeaux, les vins d’Alsace ou pour les vins du Beaujolais, qui conduisent des actions de promotion collective de leurs vins.
 
Franc-Parler : Est-ce qu’il y a d’autres régions dans le monde où vous intervenez ?
Michel Agostini : Les interprofessions françaises, les vignerons et les négociants interviennent naturellement en priorité sur les marchés actifs et très certainement dans cette partie du monde, l’Asie, le Japon est de loin le premier marché même s’il existe d’autres marchés, mais qui sont plus des marchés en devenir comme la Chine, Singapour ou Taiwan.
 
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Franc-Parler : Pourquoi, l’Alsace, la vallée du Rhône et pas d’autres ?
Michel Agostini : Je crois que chaque région a sa stratégie de développement et les consommateurs ont, eux-aussi, des goûts particuliers. Donc, c’est vrai qu’historiquement, dans le développement international des vins ou des eaux de vie françaises, ce sont la Champagne, Bordeaux, la Bourgogne et Cognac qui sont les précurseurs. Mais d’autres régions ont des vins, comme les vins alsaciens par exemple, qui correspondent à certaines spécificités et elles ont certains marchés privilégiés qu’elles cherchent à développer. Chaque région est maîtresse de sa stratégie. Ce qu’il faut savoir, c’est que le Japon est quand même loin de la France, c’est un pays qui a une très grande histoire et un très grand patrimoine alimentaire et donc développer la présence d’un produit qui correspond à une autre histoire et à un autre patrimoine alimentaire demande beaucoup de travail, de modestie et de persévérance.
 
Franc-Parler : Au niveau de la France, voit-on apparaître de nouvelles régions ?
Michel Agostini : C’est vrai qu’il y a eu une évolution notamment dans le sud de la France, et certaines régions qui étaient plus tournées vers les vins de table, produisent maintenant des vins d’appellation extrêmement intéressants. Je pense au Roussillon, au Languedoc, à la Provence mais aussi aux vins du Sud-Ouest. Et donc on a aujourd’hui, dans toutes les régions, avec des histoires différentes, des produits qui sont quelque part des nouveaux produits, tout en s’appuyant sur une longue tradition, qui se sont créé par leurs efforts une notoriété nouvelle.
 
Franc-Parler : Comment ça se passe pour obtenir cette AOC ?
Michel Agostini : La reconnaissance en appellation d’origine ne se fait pas en un jour. Elle se fait sous le contrôle de l’État au sein de l’Institut National des Appellations d’Origine qui regroupe les différents ministères concernés et les syndicats professionnels. Ce travail est extrêmement long et ne sont reconnus en appellation d’origine contrôlée que toute une série de produits qui ont su conduire un processus extrêmement long de sélection des terroirs et avec un constat de la spécificité des produits. Donc, ce processus qui s’étale sur une cinquantaine d’années, puisqu’il y a différentes échelles, correspond, en France, à des régions qui ont une histoire viticole. Par exemple, les vins de Provence ont été la première implantation viticole en France par les Grecs. Simplement, l’évolution de ce vignoble pour l’amener à l’appellation d’origine contrôlée a presque pris 2000 ans, comme quoi l’histoire a ses raccourcis.
 
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Franc-Parler : La consommation de vins baisse en France…
Michel Agostini : En France, il faut savoir, que le vin a été longtemps considéré comme un aliment et que l’évolution de l’alimentation et des modes de vie fait que le vin appartient naturellement toujours au repas mais est plus dans le repas qu’un aliment constitutif de l’alimentation elle-même. Ce qui a conduit à une évolution totale du mode de consommation du vin qui était à la base un vin de qualité moyenne sans identification précise. Le vin, maintenant devient un plaisir et ce plaisir se fait autour de vins, notamment d’appellation d’origine, qui amènent des spécificités et des qualités tout à fait intéressantes. On a eu une disparition des vins de table sans indication géographique et une croissance importante des vins avec appellation d’origine. Ce que recherche le consommateur, c’est certainement une sécurité sur la qualité mais aussi une diversité dans les goûts et une adaptation aux différents moments de vie.
 
Franc-Parler : Est-ce que cela implique aussi une sécurité au niveau alimentaire ?
Michel Agostini : Un système d’indication géographique ne correspond pas à un système sanitaire. Il existe en France comme dans d’autres pays, des agences publiques parce que la santé publique dépend de l’État et non de syndicats professionnels, qui veillent à ce que nos produits soient totalement conformes aux règles sanitaires et nos producteurs et nos négociants sont extrêmement vigilants là-dessus. Vous savez, une réputation met plusieurs siècles à se créer, elle peut prendre une heure pour être perdue. Donc, il est évident que la vigilance est extrême. Mais l’information ou la garantie qu’offre l’indication géographique au consommateur n’est pas une garantie sanitaire.
La garantie offerte par l’indication géographique, c’est la garantie qu’il va avoir un produit spécifique. C’est-à-dire dans un monde où tout le monde s’habille pareil, où tout le monde mange pareil, il est important de garder et de promouvoir dans le respect de l’autre certaines différences. Et là, nous sommes pour la diversité alimentaire ; cette diversité alimentaire, elle est garantie par des contrôles qui assurent que le produit non seulement vient d’un endroit, mais est aussi élaboré selon certaines méthodes traditionnelles et que donc la conjugaison de cette origine plus de ces méthodes d’élaboration donne un produit qui a un goût particulier. Et c’est ce goût particulier qu’à travers l’indication géographique, on va offrir aux consommateurs.
 
Franc-Parler : Peut-on parler de modèle français pour le reste de l’Europe ?
Michel Agostini : La France a été certainement un des pays à la pointe des appellations d’origine géographique mais toutes les grandes civilisations ont associé certains produits à un nom géographique, que ce se soit médiatisé ou pas, à travers un système juridique et professionnel. Les Japonais n’ont pas attendu les Français pour faire le bœuf de Kobe exactement comme à côté de nous, en France, nos voisins de Porto élaboraient un produit viticole de très haute réputation. Il y a toujours eu dans le monde l’association entre des noms géographiques et des noms de qualité. Le passage à l’indication géographique, à l’appellation d’origine est une systématisation, un mode d’organisation autour de ce produit justement pour offrir d’une part au consommateur les garanties qu’il attend, et d’autre part de permettre aux producteurs de vivre justement de leur travail, sans que cela soit toute une série d’intermédiaires qui le fassent à leur détriment.
 
Franc-Parler : Quel est l’impact sur le tourisme régional ?
Michel Agostini : Le tourisme est la première activité économique française et le vin, ou l’activité viticole, est le troisième élément fondateur du tourisme d’après la Maison de la France. Donc, il y a un lien direct entre le tourisme et la viticulture. Le vin fait venir des touristes en France, et nos amis touristes, notamment les Japonais quand ils nous font l’amitié de venir en France, qu’ils se souviennent une fois rentrés chez eux, qu’ils ont visité de beaux paysages avec de belles vignes et qu’il y avait des vins qu’ils pouvaient boire et qu’ils peuvent boire aussi au Japon.
 
Novembre 2004
Propos recueillis : Éric Priou
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